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Méridien, passion et sciences épiques

Une histoire qui prend le cœur en otage, un voyage d’exception, vrai, de savoir et de souffrance, Méridien est un enchantement du début à la fin. Plate la Terre ou ronde avec des pôles ? Au XVIIIe siècle, on veut savoir et les plus grands noms des Sciences, ceux que les stations de métro perpétuent sans qu’on sache toujours qui ils sont, embarquent pour des mois, des années bourlinguer sur les mers du monde, visiter des pays lointains. Arnaud Le Gouëfflec (Underground) a écrit les chapitres « ininventables » de ce périple, Briac (La Nuit Mac Orlan) en a tracé les portraits des héros, les paysages, ajouté ses superbes couleurs et Marlu le lettrage. Méridien est un ouvrage de référence non seulement intelligent mais subtil, émouvant, touchant et base de notre savoir encore aujourd’hui. Une référence en tout point.

Dans la jungle il chasse les nouvelles espèces de plantes sous l’œil amusé des perroquets. Un fou ou l’est-il devenu cet homme blanc esseulé ? Le Portefaix, navire royal est parti avec à son bord La Condamine, Séniergue le médecin, Godin mathématicien chef de l’expédition faible et malhonnête, Bouguer, De Jussieu le mélancolique médecin aussi mais qui va explorer faune et flore. Tout semble encore simple et il y a un but à tout ceci fixé par De Maurepas. La Terre est-elle une sphère aplatie ou allongée au pôles ? Deux expéditions sont parties. Celle de Maupertuis et celle du Portefaix vers l’Équateur. On va mesurer, comparer, calculer. Direction le Pérou, terre espagnole et sommets. Jussieu se fait mordre ce qui n’arrange pas ses humeurs. Il tient son carnet de voyage à Potobello. Pas simple les relations avec les autorités du coin. Savants certes mais espions peut-être. A y être autant profiter de la vie car les affaires sérieuses vont commencer.

La fluidité du récit est extrême à croire même qu’on est témoin, voire membre de l’expédition. Les caractères sont trempés, relevés par le dessin, les dialogues ciselés. Les sciences sont aussi des légendes comme ce Pacifique que l’on croyait plus bas que l’Atlantique. Les relations sont parfois amicales, tendues ou ironiques pour cette élite des sciences qui va vivre drames et péripéties, affronter la mort, la lâcheté, la peur, la souffrance. Les Indiens, l’esclavage, on veut tenir son rang et découvrir la vérité sur la forme de la Terre. Une cavalcade épique, brillante que ce Méridien qui jamais ne lasse bien au contraire. Briac a sublimé le tout. On aimerait voir ses planches, leur poésie rare, l’envol du trait si expressif, le découpage qui joue avec le regard du lecteur. Que du plaisir et un cahier final très bien venu.

Méridien, Éditions Locus Solus, 29 €

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