C’était osé. Commencer par la fin pour revenir au fil des pages à la naissance d’un amour passion mais impossible, Jordi Lafebre l’a fait, du chapitre 20 au chapitre 1 de son Malgré tout. D’autant plus audacieux qu’on sait la fin dès le début si l’on peut dire mais il y a tant de tendresse dans le récit, de sincérité, de bienveillance et de bonheur qu’on se dit qu’après tout, la vie c’est une succession de souvenirs dont nous sommes les enfants vieillissants. Ana et Zeno, à la soixantaine joyeuse, vont être les héros d’un flash-back que Jordi Lafebre (La Mondaine, Les Beaux Étés), pour son premier album solo, a décidé de leur faire vivre, de nous rendre les témoins. On est ému, à l’écoute de ces deux destins qui, c’est vrai, aussi sont très sympathiques car honnêtes, purs. Pour le dessin, on a dit combien de fois que celui de Jordi était un petit volcan de vie, pétillant, ciselé et souriant, optimiste même quand ses personnages pleurent.
Cheveux courts Ana, l’ex mairesse et son amoureux Zeno, libraire presque retraité. Depuis 40 ans ils s’aiment et ils vont enfin s’embrasser. Que se passera-t-il après ? Quelle importance car c’est ce qui s’est passé avant, depuis le premier jour, qui a fait que leur amour ne s’étiole pas. Se faire couper les cheveux a permis à Ana de tout dire à sa fille, qu’elle est amoureuse et va peut-être vivre avec cet homme, qu’elle n’a jamais trompé son mari en 40 ans de mariage. Zeno va être enfin thésard, docteur en physique. Il est temps pour lui de relâcher ses papillons. Comme il y a peu, le docteur est venu dire à Ana de se calmer et son mari lui dire qu’il sait pour elle et Zeno.
On peut être désorienté mais on prend très vite le rythme de ce rajeunissement dont l’amour est le fil rouge. On parlera d’exercice de style. C’est une erreur. Qui n’a pas un jour refait sa vie à l’envers, décelant de ci de là des joies qui ont bâti une vie ? Jordi Lafebre a signé l’album le plus chaleureux de cette fin d’année. Ses deux amants sont enviables, ceux qui les entourent aussi. Un délice subtil, nostalgique, une histoire souriante. Jordi Lafebre a réussi sans faille à créer un récit qui touche au plus près du cœur, quand il est pris par le grand amour d’une vie.
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