A comme Eiffel, un génie à facettes

Un contrarié Gustave Eiffel, avec une mère tyrannique et une Tour qui restera à jamais son grand-œuvre. Pourtant sa vie n’a pas été un lit de pétales de roses. Il n’a pas pu épouser pour cause de cousinage et de chute de cheval le grand amour de sa vie, Alice. Avec des origines allemandes, on le considère comme un boche et à la limite juif, ce qui est encore mieux dans une France rongée par l’antisémitisme. Son enfance ne sera pas des plus gaies mais voilà, quand on est un génie, on finit toujours par réussir. On peut aussi déraper. Avec A comme Eiffel, c’est une découverte que signe Xavier Coste (A la dérive) et Martin Trystram. Une biographie romanesque passionnante et touchante car déflorant une réalité loin de la légende de ce grand esprit universel.

A comme Eiffel A l’école, il est le souffre-douleur de ses maîtres. Déjà, il est amoureux de la cousine Alice. Il vit loin de ses parents. Alice a un accident alors qu’il joue avec elle sur le toit d’une grange. Elle tombe et se fracture le bassin. Son oncle, un visionnaire, va influencer le jeune Gustave qui va se lancer dans une maison à 16 ans avec Alice. Véto maternel, dragon malfaisant, prétentieux, elle défend le nom de la famille, Bönickausen dit Eiffel, à travers son fils. Gustave n’est pas encore Eiffel qu’il finira par garder comme nom. On vire Gustave à Paris où il va mener la grande vie, obtient ses diplômes et commence à bâtir des ponts. Sa sœur s’occupe de lui. Gustave aura toujours avec les femmes de la famille des rapports très particuliers, voire ambigus, dont avec sa fille Claire. On le marie avec une génitrice bien portante mais pas drôle. Il construit le viaduc de Garabit, la gare de Budapest, l’observatoire de Nice. IL part en Indochine pour y faire des ponts toujours en activité à Hué ou Saïgon. Sa carrière prend son vol. Sa femme meurt. Arrive le projet de la statue de la Liberté et de sa structure. Eiffel trouve la solution et retrouve Alice. C’est enfin le projet d’un monument de 300 mètres de haut, une tour, mais il y a aussi le marché du canal de Panama qui va lui coûter très cher.

A comme Eiffel Il sera attaqué, jalousé, méprisé alors que rien dans sa vie, et en particulier le scandale du canal de Panama, ne peut lui être reproché. Il sera pourtant accusé, jugé, mais réhabilité. Son œuvre est sans conteste majeure mais il est vrai aussi que c’est sa Tour qui fit sa gloire. On aurait dû la démonter. Elle reste le symbole de Paris et de la France, inventive, brillante et inégalée même si aujourd’hui on dresse des tours de verres aux hauteurs incroyables mais avec une technologie inconnue à la fin du XIXe siècle. L’album donne des réponses, apprend, décortique le phénomène et le profil d’un homme complexe mais fidèle à ce qu’il croit. Le dessin de Trystram est très léché, apporte une part de rêve et de poésie à la vie en dents de scie d’un précurseur incroyable.

A comme Eiffel, Casterman, 21 €

A comme Eiffel

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