Anent, à la rencontre des Indiens Jivaros

Avec ses nouvelles des Indiens Jivaros, Alessandro Pignocchi a réussi un tour de force. Anent, titre de son ouvrage, offre un accès à la fois intelligent, documenté mais ludique à un univers qui croule sous les idées reçues. Son maître à penser est Philippe Descola qui a passé trois ans en Amazonie, chez les Achuar, un des derniers groupes de Jivaros encore pas trop « envahis » par l’occident dévastateur. Pignocchi est parti sur les traces de Descola et de son œuvre majeure, Les Lances du crépuscules. Un expérience étonnante, émouvante mais surtout réconfortante à condition qu’une fois encore on ne détruise pas un univers fragile sous prétexte de civilisation en marche.

Anent

Les Anent sont des petits poèmes chantés à voix basse par les Achuar pour communiquer avec le monde qui les entoure, animal ou végétal. Car les Anchuar sont animistes. Ils croient en une force vitale qui animent humains, animaux, végétaux et même les objets. Pignocchi est parti jeune en Amazonie et ce n’est que plus tard qu’il lit le livre de Descola. Il n’ira pas de suite chez les Anchuar mais en profite pour dessiner les oiseaux d’Amazonie. Il repart en Équateur et veut rejoindre les Achuar. Il y arrive et c’est le début d’une aventure d’exception que son crayon et ses pinceaux racontent.

On se plonge dans le récit de voyage de Pignocchi avec curiosité puis envie. Le dessin et les aquarelles de l’auteur apportent le contexte et le support nécessaire à un monde qui échappe à notre pseudo rationalisme. La force de Anent est de donner des clés modestement, pas toutes, pour approcher les Jivaros, en douceur et parfois tendresse, avec une pointe d’humour qui ne vient pas de là où on pourrait l’attendre.  Même si on est loin des montagnes ou du Pôle, on pense à Frison-Roche, Tazieff ou Paul-Émile Victor. Le lien est celui des scientifiques capables d’être des conteurs, témoins, pas donneurs de leçon. Un album enchanté.

Anent, Nouvelles des Indiens Jivaros, Steinkis, 20 €

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