Une Histoire de France, pouvait bien mieux faire

Raconter l’Histoire de France à travers celle d’une famille bien de chez nous, n’est pas nouveau. Ou même celle d’un village. Pourtant, cette fois, ce n’est pas n’importe quel maître d’œuvre qui en assure l’idée de cette Histoire de France revisitée. Michel Onfray est un philosophe engagé. Il fait grincer des dents, jusqu’au-boutiste, polémiste. C’est lui donc qui, avec Thomas Kotlarek au scénario, s’attaque, il n’y a pas d’autres mots, aux grands moment du XXe siècle. Gare de départ la seconde guerre mondiale, puis la décolonisation, Mai 68, l’état maastrichien, les gilets jaunes, on ne sait jamais, par opportunisme intellectuel. Au dessin, Jef qui a rejoint le duo. On se plonge avec curiosité dans ce premier tome qui déjà, part sur les incompréhensibles poursuites contre un cameraman qui a filmé et diffusé sur le net un attentat en direct. Une somme en fait très caricaturale, à charge, qui repose sur beaucoup d’à-peu-près et quelques incohérences.

Une Histoire de France De nos jours à Lyon, Romain est en prison face à son avocat, Franck Pirondélis. Romain a diffusé sur le net les images d’un attentat meurtrier. Son père, un intellectuel médiatique, a embauché Franck qui va aller enquêter chez les grands-parents de Romain. Manette, la grand-mère le reçoit avec son mari, Titi, ancien militaire depuis 1939, puis l’Indochine et l’Algérie. On parle de Tirailleurs Sénégalais, d’Occupation et de leur rencontre dans un cinéma de Lyon. Titi s’engage dans les Chantiers de Jeunesse. Des manifestants viennent assiéger la maison des grands-parents pendant qu’ils continuent à raconter à Franck leur faits de résistance. Manette rencontre Rose et Jean qui est peintre. Elle pose pour lui. Titi revient et leur relation se complique. Pas vraiment un intello le beau militaire. On le voit réapparaître à Lyon pour un vernissage dans une galerie qui jouxte la Kommandantur allemande, en uniforme se vantant auprès de Camus d’arriver d’Alger où il serait aller faire un stage formé par des SAS anglais.

La Dalle rouge On arrête là tant, déjà, ce dernier fait scénaristique est incroyable, gratuit, impossible. Un para France Libre en goguette à Lyon occupé en uniforme, bravo. C’est certes un détail que pas beaucoup de lecteurs relèveront. Ces mêmes SAS français sont bien, par contre plus tard, au cœur de la libération de la ville en 1944. Le personnage de Titi est directement inspiré par Bigeard pour les souvenirs mais pas le physique, vouloir qu’on parachute ses cendres sur Dien Bien Phu, le fanion avec la devise Croire et Oser. Ce qui est compliqué avec cet album est de ne pas savoir où est la rigueur historique par rapport au romanesque. Si les évènements en Algérie du 8 mai 1945, les massacres odieux contre la population musulmane et le rassemblement punitif méconnu sur la plage de Melbou, sont parfaitement racontés, il y a un manque de cohésion scénaristique certain. L’histoire ne tient pas, trop d’incohérences. D’autant plus dommage que la démarche était intéressante. Onfray est une personnalité atypique et talentueuse, que l’on adhère ou pas à ses idées. On sent toutefois le discours à charge tout azimuts, très politisé. Le dessin de Jef est cohérent, fin et appliqué, toujours travaillé, plus ligne claire que d’habitude (Deux hommes en guerre, Corps et âme). Il y aura six tomes au total de cette curieuse Histoire de France. Le prochain fera un sort à Mai 68.

Une Histoire de France, Tome 1, La Dalle rouge, Le Lombard, 14,99 €

La Dalle rouge

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