Le Prix René Goscinny récompensera désormais un scénariste

C’est un choix courageux et il fallait le faire. Mettre les scénaristes en avant au même titre que les dessinateurs, est bien la moindre des choses. D’autant qu’on a rarement vu un bon dessin bien fonctionner avec une mauvaise histoire. Et que le statut de scénariste se dégrade de plus en plus face aux éditeurs. Raison pour laquelle le Prix René Goscinny a décidé pour cette année de changer, si l’on peut dire, son fusil d’épaule. L’Institut René Goscinny a décidé de modifier les conditions afférentes à son prix afin de s’inscrire au plus près de la cause qu’a défendu toute sa vie René Goscinny. Plus que jamais, il est nécessaire de mettre l’accent sur la reconnaissance dont devrait jouir le scénariste. Depuis maintenant deux ans, le Festival et l’Institut René Goscinny ont remis à l’honneur le Prix René Goscinny, le lauréat ou la lauréate, sera annoncé le 20 novembre prochain lors de la Conférence de Presse du Festival d’Angoulême et le Prix sera remis lors de la Cérémonie de Remise des Fauves du Festival, le samedi 26 janvier 2019.

Voici le communiqué très précis et bien construit publié par le Prix René Goscinny :

Avant que René Goscinny ne s’attache à lui donner ses légitimes lettres de noblesse, le métier de scénariste de bande dessinée était méconnu, ignoré du public. Les contours de cette profession étaient flous, le pouvoir accordé au scénariste restreint et sa rémunération souvent laissée à la discrétion du dessinateur. Tout au long de sa carrière, René Goscinny joua un rôle essentiel dans la reconnaissance de sa profession. Il fut le premier auteur de bande dessinée à défendre ses droits, amorçant par ses revendications et ses actions une structuration du statut actuel de scénariste. Grâce au succès d’Astérix, de Lucky Luke et d‘Iznogoud, René Goscinny obtint non seulement que son nom apparaisse sur la couverture d’albums tirés à des centaines de milliers d’exemplaires mais parvint aussi à le faire figurer dans les contrats. Précision capitale car cela lui octroya des droits d’auteurs sur les albums dont il est le scénariste et sur les adaptations animées, les produits dérivés ou la publicité. Alors rédacteur en chef du journal Pilote, il fit inscrire les noms des scénaristes aux côtés du dessinateur en tête des planches, premier pas d’une reconnaissance méritée du métier.

René Goscinny
René Goscinny. Institut René Goscinny ©

Si ce combat de longue haleine fut déterminant pour tous ses confrères, il est aujourd’hui loin d’être gagné. La répartition de la rémunération, la propriété et le droit de suite sur les originaux, les formations aux métiers de l’écriture, les attributions de bourses, ainsi que le nombre de scénaristes récompensés d’un prix, sont encore sujets à des inégalités au regard de leurs compagnons dessinateurs. Sensibilisé à cette situation, l’Institut René Goscinny a décidé de modifier, dès cette année, les conditions afférentes à son prix. Le Prix René Goscinny récompensera désormais un scénariste pour l’ensemble de son œuvre, ou l’auteur d’un album pour son scénario.

Créer des univers, inventer des histoires, faire évoluer des personnages, leur écrire des dialogues, insuffler un esprit, telles sont quelques-unes des tâches passionnantes et essentielles qui incombent à ces créateurs trop longtemps restés dans l’ombre, et qui méritent enfin d’être reconnus à leur juste valeur.

« Ce qui me rend heureux et fait de moi un privilégié, c’est de pouvoir faire de mon violon d’Ingres mon métier. Je crois que c’est un privilège extraordinaire. »
René Goscinny, Radioscopie (1972)

Jean Harambat
Jean Harambat. JLT ®

A noter l’exposition Jean Harambat, Aller-retour, qui se tiendra à Angoulême avec le soutien de l’institut René Goscinny. Du 24 au 27 janvier 2019, Jean Harambat, sera à l’honneur d’une exposition, qui succédera à celle consacrée l’an passé à Emmanuel Guibert, le précédent lauréat. Lauréat du Prix René Goscinny en 2018, Jean Harambat est l’auteur d’une œuvre où se mêlent la littérature, l’intime et le goût de l’aventure.

Avant de publier ses premières bandes dessinées il y a une dizaine d’années, Jean Harambat a vécu en Argentine, en Tasmanie et dans différents pays d’Afrique, après avoir suivi des études commerciales puis de philosophie. Issu d’une famille d’agriculteurs, l’auteur est un autodidacte du dessin qui assimile volontiers sa pratique à un artisanat. Bien que Jean Harambat adapte son trait et son écriture aux sujets qu’il choisit, ses œuvres sont traversées par des motifs communs, qui sont autant d’aller-retour entre de multiples lieux : mouvements vers l’avant ou vers l’arrière, à l’image des règles du rugby qu’Harambat a longtemps pratiqué, voyages en de lointaines contrées avant de revenir aux racines landaises, comme l’auteur le raconte dans En même temps que la jeunesse (Actes Sud BD). Dans Ulysse, Les Chants du retour (Actes Sud BD), le héros d’Homère cherche à retrouver Ithaque en même temps que son identité perdue, tandis qu’Archie Weir se voit contraint de regagner ses rugueuses terres écossaises dans Hermiston (Futuropolis). Ces récits d’initiations abordent différents genres et différentes époques, le lecteur passant de l’Antiquité à la Gascogne du XVIIe siècle, des plaines argentines au Londres so British d’Opération Copperhead (Dargaud), comédie d’espionnage où brillent les légendaires acteurs David Niven et Peter Ustinov.

Dédicace de Jean Harambat

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