Interview : Olivier Speltens de L’Armée de l’Ombre en Russie à l’Afrikakorps de Rommel en Libye

Après sa série L’Armée de l’Ombre qui s’appuyait sur la campagne du front de l’est de la Whermacht, Olivier Speltens a traversé la Méditerranée pour rejoindre la Libye. C’est l’Afrikakorps qu’il rejoint, titre et sujet de sa nouvelles série en trois albums chez Paquet. Le tome 1, Battleaxe, vient de sortir. On va suivre un chef de char allemand tout au long de la guerre du désert sous la houlette du Maréchal Rommel. Speltens a ce soucis du détail, ce réalisme appuyé, qui font de son dessin et de ses histoires de vraies sommes historiques auxquelles il associe le romanesque afin d’être au plus prêt des acteurs du terrain. Olivier Speltens s’est confié à ligneclaire.info et parle aussi de son prochain projet. Propos recueillis par Jean-Laurent TRUC.

Olivier Speltens
Olivier Speltens. Photo Jean-Pierre Ruelle ©

Olivier Speltens, pourquoi ce choix de passer du front de l’Est à celui d’Afrique du Nord avec l’Afrikakorps en Libye ?

C’est un choix pour moi logique après l’accueil positif du public pour L’Armée de l’Ombre. Comment continuer pour toujours plaire à ce public ? Avec L’Armée de l’Ombre, on avait osé parler de l’armée allemande dans un contexte pas évident. Donc l’Afrikakorps s’imposait pour la suite dans un décor différent.

Et avec une image plus sympathique entre-guillemets que celle des opérations à l’Est, avec Rommel, Montgomery, moins marqué que bien d’autres tragédies de la seconde guerre mondiale ?

C’est une armée dont on n’a jamais eu trace d’exactions comme la Wehrmacht et la SS en Russie. Rommel a toujours eu bonne presse même s’il était avant tout un général allemand, nazi convaincu ou pas. Parler de lui peut intéresser surtout qu’Hitler l’oblige à se suicider après l’attentat de juillet 44 dans lequel il était impliqué s’il ne veut pas que sa famille soit déportée. Les gens connaissent El Alamein, Rommel ou l’Afrikakorps. Donc je me suis engouffré dans ce sujet, cette image d’Épinal, pour retranscrire la réalité.

Vous couvrez la totalité de la guerre du désert jusqu’à la fin, El Alamein et les Anglais qui reprennent la main ?

Afrikakorps Mon parti pris c’est de suivre un équipage de char allemand, avec le lieutenant Von Richter, un fil rouge. Il a servi en France en 1940 avec Rommel. C’est un noble pas très bien vu par les nazis. Et lui ne porte pas le parti dans son cœur. Il faut se replonger dans le contexte de l’époque.

L’Afrikakorps est précoce. On est début 1941, en février. L’Angleterre se bat seule avec l’aide du Commonwealth. L’Allemagne est toute puissante.

C’est un galop d’essai après la Pologne, la Belgique, la France. L’armée allemande semble invincible.

Et si Rommel avait réussi à arriver au Caire que ce serait-il passé ? Il aurait pu ?

Si le haut-commandement avait cru dans ses capacités, envoyé le matériel nécessaire, les Anglais auraient dû céder.

Donc ils l’ont lâché au plus haut sommet ?

Tout à fait, Rommel n’avait pas ordre d’attaquer les Anglais. Il avait juste ordre de défendre Tripoli, bloquer les Anglais qui avait mis à la porte les Italiens. Mais Rommel, le Renard du désert, a foncé.

Afrikakorps

Rommel fait penser à Patton ?

Exactement. Ce sont des généraux s’attirent beaucoup d’ennuis mais ils gagnent et on ne leur dit rien.

Le tome 1, c’est la poussé de l’Afrikakorps avec Tobrouk.

Oui c’est la victoire allemande qui repousse les Anglais vers l’Égypte. Une sorte de jeu de yoyo. Tome 2, les Allemands reculent. Tome 3, ils reprennent l’offensive et ils se font battre à El Alamein.

Le rôle de l’Italie ? De la figuration ?

Non pas du tout. Elle a beaucoup épaulé l’armée allemande mais mal commandée, avec un matériel périmé. Et ce sont deux états d’esprit différents.

En matériel, on voit dans l’album que celui des Allemands est moderne mais mal adapté et celui des Anglais dépassé ?

Absolument. Il a fallu s’adapter au climat, les chars tombaient en panne avec le sable, un enfer de maintenance. Mais les Anglais avaient du matériel pas innovant. Deux chars anglais perdus pour un allemand, ce qui a sauvé aussi Rommel.

Côte documentation, il vous a fallu amasser avec pas mal de conseillers ?

Afrikakorps En fait, depuis le tome 1 de L’Armée de l’Ombre j’ai été contacté pas mal de gens qui connaissent bien le sujet. Ils m’ont proposé de la documentation, des livres. Donc ensuite j’ai eu à débroussailler tout ça.

Vous avez beaucoup de retours de lecteurs ?

Énormément et positifs.

Vous ramenez la guerre à l’homme comme Von Richter ou son adjoint Otto Muller ?

La guerre en elle-même oui. Cela ne m’a jamais vraiment tenté d’en faire un compte rendu mais la psychologie du soldat qui se bat dans des conditions terrifiantes c’est intéressant.

Le ravitaillement est aussi la clé dans cette lutte entre Afrikakorps et les Anglais ?

C’est un point du tome 2. Les Allemands vont aller très vite et ils vont sentir le poids du manque en carburant alors que les Anglais ont Malte où arrive ce qu’ils veulent, plateforme de la RAF qui coule les bateaux allemands.

Quel est le rôle de l’aviation justement ?

Important, les chars de l’Afrikakorps éteint précédés par la Luftwaffe. Le problème était la taille du théâtre d’opérations. Des Stuka, Dornier, Junker, des ME109 contre rapidement Spitfire ou P-40. C’est un front qui a aussi permis aux Allemands de tester leurs avions pour la suite dont la Russie.

Afrikakorps Comment avez-vous travaillé techniquement ?

De façon traditionnelle. La documentation puis le scénario avec les personnages, story-board, encrage. En gardant réalisme et logique des faits fidèles à la réalité historique. Les couleurs sont sur ordinateur. Je peux jouer sur les poussières ou autre.

Le rôle de Montgomery ?

Il apparait dans le tome 3 car il arrive tard en Libye. Churchill cherchait un général capable de gagner après en avoir limogé plusieurs. Si on étudie la tactique de Montgomery, c’est le fonceur avec un maximum de matériel. Il est tombé au bon moment quand les Allemands ont manqué de ravitaillement. A El Alamein les chars allemands ne pouvaient plus manœuvrer sans essence.

On parlera de Bir Hakeim et des FFL ?

Je ne sais pas car mon héros ne sera pas dans le secteur. Si je peux, pourquoi pas car c’est un fait important de la France Libre. 46 pages c’est court. Et je suis sur trois albums sur un peu plus d’un an. Quatre je ne sais pas.

Et après l’Akrikakorps ?

J’ai bien envie de partir dans le Pacifique et de parler d’un pilote japonais. J’adore les avions mon premier amour. Un diptyque peut-être avec l’histoire inspirée de celle d’un as japonais. Je passe à l’aérien, toujours pour parler des méchants. J’aurai adoré faire le débarquement de Normandie mais j’aime appendre des choses à mes lecteurs comme ils me l’on dit pour L’Armée de l’Ombre.

Merci à Olivier Speltens pour les illustrations.

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