Tintin, un éloge pas si petit que ça

Si il y a bien un héros de BD, et non des moindres, qui a donné lieu à une littérature inflationniste, c’est bien Tintin. Ce qui arrivera finalement sur le tard mais en fera un sujet mis à toutes les sauces universitaires ou autres. A croire que pour acquérir ses lettres de noblesse, la BD avait besoin d’envahir les rayons d’ouvrages dits de références sur ses héros, de Corto à Tintin, en passant par Gaston ou autre Astérix. On va donc souligner tout l’intérêt de deux livres qui viennent de sortir et en tout premier, celui de Jacques Langlois, grand spécialiste qui a commencé très jeune à avoir une passion dévorante pour Hergé avec lequel il a eu la grande chance d’entretenir une correspondance et une amitié, on peut le dire, d’exception. Ce qui nous amènera ensuite à un parallèle osé entre Brassens et Tintin.

Petit éloge de Tintin

Dans Petit éloge de Tintin, Jacques Langlois part de deux faits bien précis, la mort de Tchang et celle de son ami Hergé. Depuis un premier courrier reçu d’Hergé en 1961, Langlois vit avec Tintin. Pourtant, et avec une similitude de destin avec un parcours qui m’est cher, il n’a découvert le petit reporter qu’à la fin des années 50, avec Le Lotus Bleu, moi avec Le Sceptre d’Ottokar pour ma communion. On lisait les Pieds Nickelés, Blek et Tartine, la BD était interdite de séjour, ma grand-mère y veillait. Au mieux pouvait-t-on tomber sur un Bicot oublié issu de la jeunesse maternelle. Une parenthèse bouclée car ce n’est pas pour autant que Tintin n’a pas toujours été supplanté par mon Spirou et son génial Franquin. Langlois en plus dessine et envoie ses dessins à Hergé en 1960. Bingo, il reçoit une belle dédicace. On revient sur Astérix l’outsider mais qui ne prendra pas pour autant la place de Tintin même si il met du temps à vivre de nouvelles aventures. La mort d’Hergé ouvre la porte des bibliothèques, des amphis, des thèses Langlois cite Daninos, Malraux. Et bien d’autres. En fait Langlois nous raconte sa vie, avec humour, anecdotes, et celle de son Tintin. Il le décrypte mais avec sagesse et intelligence. Les albums sont là, tous, Tintin en culotte de golf ou en pantalon. On prend un vrai plaisir à cet éloge, ce plaisir qui est avant tout le moteur qui a fait avancer Langlois tout au long de son amitié passion pour Hergé et le petit reporter.

Petit éloge de Tintin, Éditions François Bourin, 12 €

Brassens et Tintin

Dans un tout autre registre mais qui pour un adorateur de Georges, voici Brassens et Tintin, deux mondes parallèles. Il fallait y penser à rapprocher le Sétois du Bruxellois. Renaud Nattiez l’a fait. Et cela répond à une évidence au demeurant mystérieuse, leur public semble bien avoir des atomes crochus. Des mondes parallèles, mis en pages, d’un côté les chansons, de l’autre les albums. Dans les deux cas, ce qu’on considérait comme des amuseurs de bancs publics sont devenus des mythes. Des animaux dont un gorille chez Brassens, Milou chez Hergé, Nattiez est philosophe, enquêteur et prône la concordance. Il s’appuie sur des exemples, fouille, démontre et prouve. Cela reste cependant une thèse que défend Nattiez. On lit et on s’amuse de l’analyse qui a le mérite non seulement de l’originalité mais aussi d’un vrai travail de recherche.

Brassens et Tintin, deux mondes parallèles, Les Impressions Nouvelles, 17 €

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