Pour être tout à fait honnête la Princesse de Clèves, c’est surtout dans le souvenir de bon nombre d’ex-adolescents la très belle Marina Vlady dans le film de Jean Delannoy en 1961. Son mari chagrin qu’elle n’aime pas, c’est Jean Marais. Le couple a donné vie à une sorte de mythe amoureux dans lequel, pas un instant, la Princesse ne pouvait passer pour une bimbette. Ferme et fidèle, pas virulente la dame face à ce Nemours qui lui avait fait une faille au cœur qui finira par avoir la peau de son mari. Le film nous avait fait lire le livre pratiquement aussi languissant mais sans Marina, histoire quand même de ne pas décrocher face aux copines qui le mettait sur un piédestal. On n’était pas loin du phénomène Vian avec L’Écume des Jours mais loin de J’irai cracher sur vos tombes. Revenons à Je t’aime, moi non plus. Claire Bouilhac et Catel Muller ont voulu redonner une seconde jeunesse au roman de Madame de La Fayette. Elles se sont partagées dessins et scénario, une œuvre commune à laquelle elles rajoutent, et c’est peut-être le vrai plus de l’album, les digressions sur la création littéraire de Madame de La Fayette avec son ami De La Rochefoucauld puis avec sa copine la divine marquise de Sévigné.
En adaptant ce roman, Catel et Bouilhac ont donné en parallèle la parole à son auteure, Madame de La Fayette. Un hommage prononcé parfois languissant à deux femmes, la créatrice et sa créature qui, à leur façon, vont imposer leur différence et leur indépendance. On a tendance à vouloir la remuer la princesse qui se la joue évanescente.
On apprécie par contre les personnages secondaires, les tours tordus de cour et de parcours bien mis en scène. Un travail solide et inventif. En fait qu’est ce qui la guide la princesse ? La certitude, et elle a raison, que si elle cède à Nemours, il va la virer dans la foulée. Elle, c’est seul l’amour éternel qui compte, comme celui de son prince, mais ce n’est pas une cause entendue à laquelle une femme doit se soumettre selon le bon plaisir masculin et, au mieux, un sentiment réciproque partagé. Dont acte mais bon…
La Princesse de Clèves, Dargaud, 24,99 €
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