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Moscou année zéro, deux en un par Nury

Avec Mort au Tsar, il y a quelques années, Fabien Nury inaugurait un diptyque décalé qui allait donner deux visions, deux récits du destin de Sergueï Alexandrovitch, oncle du tsar Nicolas II. La victime en puissance et son assassin potentiel étaient les narrateurs dans deux albums à lire séparément. Avec Moscou année zéro, Nury rebat les cartes sur le superbe dessin de Thierry Robin. De deux, il passe à un album mais, attention, pas une simple compilation avec enchevêtrement des pages. Nury est un créatif qui non seulement connait le cinéma mais sait écrire pour lui. C’est donc avec un vraie vision cinématographique qu’il a rebâti son propos, remonté son film, proposé une nouvelle lecture de ses deux albums en un. On n’a donc pas une intégrale mais au contraire un album tout neuf, et comme il l’a dit « un nouveau livre ». Autant dire que ce Moscou année zéro a peut-être encore plus de force narrative, graphique que le diptyque initial. Un excellent cadeau de Noël.

Il y a parfois des petits accidents qui font basculer l’Histoire. En 1905, la Russie tsariste prépare sa future révolution. A Moscou, une manifestation remplit les rues et le gouverneur, oncle du Tsar, Sergueï Alexandrovitch doit agiter son mouchoir pour que les troupes interviennent. Troublé, il le lâche et l’armée ouvre le feu. Erreur certes mais mortelle pour bien des manifestants. Dès lors, le destin de Sergueï Alexandrovitch est signé. Un anarchiste qui âgit sur ordre des forces socialistes russes, Georgi, prépare une série d’attentats contre lui. Tous à Moscou considère que Sergueï Alexandrovitch est un homme mort. Lui le premier. Mais il va y avoir des dérapages inattendus.

On ne se rend en fait pas compte, en lisant l’album, qu’au départ il y en avait deux. Cette recomposition est exceptionnelle comme le raconte Fabien Nury dans sa postface. Un usage extensif du droit de repentir des auteurs, c’est sa formule. Il explique les choix de pages, le travail effectué, les rajouts éventuels. Deux personnages, deux albums, la magie créatrice des auteurs, et voilà 128 pages qui fonctionnent à merveille, se redécouvrent et emballent le lecteur dans une aventure hors normes de mort annoncée, sans oublier ces rebondissements bien ficelés dont Nury est friand. La démarche est intéressante mais n’est pas à la portée de tous.

Moscou année zéro, Dargaud, 19,99 €

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