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La Callas et Pasolini, un rêve sans suite

Deux noms qui ont brillé et encore au firmament des arts lyriques et cinématographiques. Qui ne connait Maria Callas, une diva inégalée, unique ? Qui n’a jamais entendu le nom de Pier Paolo Pasolini, réalisateur iconique, écrivain, poète, qui a signé avec elle Médée et surtout Le Décaméron, Théorème ou Les Contes de Canterbury ? La Callas et Pasolini, un amour impossible (et improbable) donne tout leurs reliefs à deux destins hors du commun qui ont pourtant vu leur chemin se croiser, s’effleurer, se mélanger brièvement mais sans issue heureuse bien sûr. On parlera plus de complicité que de passion. Emmanuelle Trevi a préfacé cet étonnant et beau album de Jean Dufaux qui assure cette digression romancée sur un dessin réaliste brillant, vivant de Sara Briotti.

1969 une fête grandiose, Maria Callas regarde Bergman dans un film puis rejoint ses amis Burton et Liz Taylor. Burton est proche amicalement de la Callas. Ils parlent de Médée qu’elle va bientôt tourner avec Pier Paolo Pasolini qui, lui, s’est fait évincer par son amant Ninetto grand amour de sa vie. La Callas, c’est Onassis qui l’a remplacée par Jackie Kennedy qu’il a épousée et elle souffre. Pasolini face à la gloire à laquelle personne n’est vraiment préparé. Maria et Pier Paolo s’en vont comme un couple qu’ils ne sont pas, immortalisent pourtant leur amour sur le mur d’Aurélien. La Callas doute, sait qu’il ne suffit pas d’avoir une belle voix, interroge Pasolini sur ses intentions pour Médée. Un personnage qui est allé jusqu’au meurtre et un film presque muet dans lequel elle ne chante pas, un péplum qui irritera la critique et le public. Tourné en Turquie avec des costumes très lourds, elle montre des rushes à Burton pas vraiment enthousiaste. Pour Maria, Pier Palo est comme elle seul à l’intérieur d’un trop plein.

Un duo tragique en fait, une amoureuse sincère mais qui sait que cela ne pourra jamais se conclure à plus d’un titre. Leur amour serait un moyen de passer un cap douloureux. Seule, abandonnée, perdue, torturée par une mère qui voulait en faire une icône du chant, elle se livrera. Avec Pasolini ils sont comme deux gamins mais reste à savoir si le cinéaste n’a pas surtout tablé sur la notoriété de la Callas pour son film. Le récit est comme toujours avec Dufaux, on se répète, d’une plénitude totale, les mots jouent entre eux. Il y a aussi toutes les anecdotes fictifs ou pas de cette course au bonheur même sans espoir. Une part largement romancée ? Mais après tout peu importe car on est dans une dramaturgie classique au sens quasi cornélien du terme. Pasolini mourra assassiné et Maria Callas d’un infarctus à 53 ans. Une parenthèse bouleversante que conclue en fin d’album Les Hommes de Callas par Alain Duault, une succession d’échecs, de tristesse. Visconti aussi, Onassis bien sûr, à croire que le talent suprême coute très cher.

La Callas et Pasolini, un amour impossible, Aire Libre Dupuis, 25 €

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