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Les Fleurs du Mal, Yslaire et la beauté diabolique de Baudelaire

C’est devenu une constante mais qui ne fait que reprendre une démarche artistique qui date de la fin du XIXe siècle avec de grands noms comme Gustave Doré ou Daumier voire Hetzel avec les livres de Jules Verne. Illustrer une grande œuvre littéraire n’est pas des plus simples et doit coller totalement avec l’esprit littéraire de l’écrivain pour une communion sans partage. Les Fleurs du Mal sont si ce n’est lues, connues de tous. Baudelaire dont la vie a été aussi bien mise en BD par Yslaire lui a donné l’occasion de vouloir illustrer le chef d’œuvre du poète maudit. C’est l’édition originelle de 1857 qu’Yslaire a travaillée superbement, un mythe en poésie et un rendez-vous avec les tréfonds mystérieux d’une âme tourmentée au talent génial.

Il n’avais pas été vraiment gâté par la vie Baudelaire. Ce qui se sent dès les premiers vers de son avertissement au lecteur. Lâcheté, péché, le Diable tient les fils qui nous remuent. Un voyageur cet auteur à l’esprit troublé qui nous invite au voyage justement. Yslaire l’a suivi dans sa vie houleuse qui se nourrit de poésie mais il est haï par sa propre mère pour cela. Soyez bénie mon Dieu qui donnez les souffrances. Le soleil, élévation, correspondances et Eve noire, Yslaire le suit à la trace, peaufine son trait, colle au mots. Le Spleen est tout. La muse malade dont le portrait est bien sûr celui de la Vénus vénale. Un Sisyphe, Baudelaire qui monte et remonte la mort et l’homme pourtant libre qui toujours chérira la mer. Sans oublier la charogne découverte au tournant d’un sentier par un beau matin d’été.

On est en permanence sur le fil avec Baudelaire. Yslaire, on le savait depuis Mademoiselle Baudelaire, est totalement imprégné par l’esprit du poète. Ces dessins sont à la fois des hommages, des témoignages de son ressenti, des décryptages au trait noir. Dans la postface qu’il signe, Yslaire ne sait pas vraiment pourquoi il a illustré les Fleurs mais Baudelaire l’avait inspiré dès Sambre. Yslaire se donne entièrement et le résultat est infernal, d’une beauté diabolique qui fait de cet ouvrage une vraie référence très soignées en plus dans sa présentation pour bibliophile. Un très beau cadeau de Noël.

Les Fleurs du Mal, Dupuis Aire Libre, 35 €

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