Crénom, Baudelaire quand Jean Teulé fait revivre Les Fleurs du mal

Il nous a quitté, par surprise et on n’y croit toujours pas. Jean Teulé, brillant, joyeux, écrivain pétillant s’était fait une spécialité des romans à bases historiques, évènements, rois ou écrivains, héros malgré eux comme Le Montespan. Il avait un sens des mots inimitables, avait commencé par la BD. Crénom, Baudelaire a été publié par Jean Teulé en 2020. Dominique et Tino Gelli s’en sont emparés pour une BD adaptée et on les en remercie comme Guérinau pour Charly 9 ou Entrez dans la danse. Un cas d’école Baudelaire, dandy dispendieux méprisant et pourtant génial dont la biographie romancée de Teulé était une joyeuse charge dont il avait vu presque toutes les planches. Et puis voilà.

Jeanne

Il voit des renards Charles Baudelaire dans le couvent où on l’héberge grabataire. Mais toujours l’œil vif. Sa mère s’insurge des traitements subis. Retour at home pour Charles qui revoit sa vie, sa maman qu’il adore, couple quasi fusionnel mère et enfant un brin obsédé malgré tout. Son père meurt ce qui l’arrange car il aura sa maman à lui tout seul. Sauf qu’elle rempile avec un officier, Aupick, droit dans ses bottes avec des idées précises sur l’éducation à donner à Charly. Direction le lycée Louis-le-Grand ce qui va mal se passer. Exclu et en prime il se moque du paternel de replacement. Il commence à faire des poèmes licencieux, rode dans les estaminets, fréquente bohèmes et femmes de mauvaise vie. Poèmes oui mais « pas de sentiments et autres saloperies féminines ». Il saute à la gorge de beau-papa qui lui flanque une trempe. Maman bobo et direction Calcutta pour un an de voyage histoire qu’il prenne l’air et se calme.

On en reparlera du voyage de Charles Baudelaire, albatros en vedette. Il faut bien dire qu’il avait un grain l’auteur des Fleurs du mal. Et de l’argent au moins un temps laissé par son père en héritage. Ce qui va aider ou pas. Côté amour, il ne va pas au plus facile et paye le prix pour Sarah la Louchette. Tout s’enchaîne avec Jeanne Duval la belle qu’on connaît mieux. Les dialogues de Teulé sont superbes, le dessin est vaste, enlevé, flamboyant. Il y a des pages d’une rare force graphique, pleines d’idées, évocatrices. Héros atypique, opiomane, Baudelaire sous la plume de Jean Teulé se redécouvrait, romantique désespéré et les Gelli lui on donné à leur tour un visage d’une rare lucidité émouvante. A suivre.

Crénom, Baudelaire ! Tome 1, Jeanne, Futuropolis, 25 €

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