Albums

Le Pouvoir de la satire, un vrai panorama historique

Un travail à la fois passionnant, historique, émouvant et didactique. Avec le Pouvoir de la Satire, Fabrice Erre au scénario puis au dessin avec Terreur Graphique, trace une histoire de la presse d’humeur et d’humour, celle pour la défense de laquelle Charlie Hebdo a payé un si lourd tribut. C’est le point de départ de cette rétrospective historique menée de crayon de maître par l’historien de haut niveau qu’est aussi Fabrice Erre. Un album à deux mains dont tous les éléments s’enchaînent avec précision et objectivité. Un album indispensable car il montre, si besoin était, que la liberté de la presse est primordiale pour toutes les démocraties.

On commence donc par Charlie, le « Je suis Charlie » qui voulait à juste titre montrer que le massacre qui avait touché la rédaction nous frappait tous. Interrogations assez faux-culs de fallait-il ou pas publier certains dessins. Et c’est en remontant la piste des journaux satiriques qu’on peut s’apercevoir que leur vie n’a jamais été un long fleuve tranquille. Charlie est un des derniers enfants de cette presse au panorama généalogique décrit par Erre et Terreur Graphique en images. On revient à la royauté avec les pamphlets, à la Révolution où les têtes peuvent tomber pour quelques lignes. Aucune époque n’y échappe. On fait un plan sur la fin du XIXe siècle avec une prolifération incroyable de titres au ton virulent. Stop aussi sur 14 avec Le Canard qui se lisse ses premières plumes. Ensuite, on passe au sacré. Quels sont les sujets tabous ? Dieu et ses copains ? Le caricaturiste est-il un artiste ? Judaïsme et Islam ont pris de la place. Pas touche ? Si en plus la presse satirique est grossière où va-t-on. Et la violence dans tout ça ? Rien n’échappe à la satire. Louis Philippe en poire est un sujet archi-connu, pas trop méchant au départ mais qui va vite déraper dans le « A-bas la poire » des émeutes de 1832.

Clin d’œil par Fabrice Erre. JLT ®

Enfin si il y a parmi tout les thèmes abordé un mot qui est vital, c’est celui de liberté et un autre à honnir, censure. Car toutes les excuses seront bonnes pour faire fonctionner les ciseaux d’Anastasie. Erre et Terreur Graphique ont fait un état des lieux précis, accessible. Ils ont rafraîchit notre mémoire, rappelé aussi que le rire était une arme. Ils ont détaillé leur sujet sans jamais le rendre compliqué ou abscons. La satire peut-elle sauver le monde ? La question est posée. En alternant questions et réponses les deux auteurs ouvrent bien des portes et parfois des boites de Pandore. Sans oublier l’incontrôlable internet et ses réseaux sociaux. Mais c’est une autre histoire.

Le Pouvoir de la satire, Dargaud, 17,99 €

Les ciseaux d’Anastasie symbole de la censure à la fin du XIXe siècle. BNF ©
Le Pouvoir de la satire
Partager

Articles récents

Interview : Kokopello pour un grand bazar décrypté

L'Union Européenne, un grand bazar, c'est ce que dit Kokopello dans La Tour de Babel…

28 avril 2024

Les aventuriers de l’Urraca, des pirates divers et variés

Un capitaine pirate pas très doué au moins en apparence qui va jouer son va-tout…

28 avril 2024

L’odeur des pins, on ne savait pas en Allemagne nazie

Il fallait bien plus de 200 pages pour raconter vie et destin d'une famille allemande…

27 avril 2024

Dracula, L’ordre du dragon, un retour réussi et palpitant

Un nouveau Dracula, un de plus ? Pas sûr car L'Ordre du dragon sous-titre de…

27 avril 2024

Glénat et Vents d’Ouest passent au poche

Ce ne sont pas les premiers et la tendance se confirme. La BD aime de…

26 avril 2024

Buck Danny « Classic », L’ombre rouge, guerre froide et Howard Hugues

Un nouveau diptyque dans la collection Buck Danny "Classic" dont les épisodes s'intercalent avec les…

26 avril 2024