Il fallait bien plus de 200 pages pour raconter vie et destin d’une famille allemande sur trois générations, de 1933 à nos jours dont les douze années les pires du XXe siècle. L’odeur des pins de Bianca Schaalburg (dont c’est le premier roman graphique) c’est aussi l’après guerre, l’Est, le Mur qui tombera, la réunification. Mais c’est surtout un constat, celui d’une rare ambiguïté, « on ne savait pas, ni pour les camps, ni pour la Shoah par balles, ou autre ». Les nazis n’étaient pas une poignée, 8,5 millions d’Allemands ont été inscrits au parti qui a vu ses débuts dès les années 20. Un héritage lourd et c’est justement comme cela que commence cet état état des lieux, par une armoire léguée à Bianca en 2004 par sa grand-mère, point de départ de cette saga familiale dramatique et objective.
On sent l’émotion de l’autrice car elle est face à un non-dit qui a submergé l’Allemagne et persiste. Les époques vont se répondre avec des fonds de couleur différente et Bianca les parcourt. Il y a évidemment une logique historique. 1945, l’Allemagne coupée en deux, les zones d’occupation alliés, le poids de l’URSS, du communisme, la peur d’une autre guerre mondiale, le blocus de Berlin, le Mur. Mais il y a aussi la réalité de la complicité avouée du peuple allemand ou au mieux si l’on peut dire sa passivité. A l’image de la grande majorité des Français avec Vichy et Pétain. Bianca Schaalburg a signé un ouvrage authentique qui se lit d’une traite et pose des bases indéniables, tout en ne jugeant pas mais en n’ignorant rien, en montrant comment on peut fermer les yeux, et évoluer vers d’autres mondes avec bonne conscience. Et si c’était à refaire ?
L’odeur des pins, Ma famille est ses secrets, Éditions l’Agrume, 26 €
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