Le Guide Mondial des records, toujours plus

Un fonctionnaire de l’impossible, un témoin impartial et incorruptible de l’incroyable mais vrai, Paul Baron aurait pu travailler pour le Michelin et passer son temps à saliver des papilles. Et bien non, c’est pour le Guide Mondial des records que ce brave type passe ses jours à vérifier que les prétendants ne sont pas des escrocs ou au moins des fabulateurs. Il en faut des Paul Baron histoire de se réconcilier avec la connerie humaine mais aussi la gentillesse de ceux qui feraient tout pour sortir si ce n’est qu’un instant d’un anonymat qui finira mal, c’est prévu, en forme de pierre tombale. Tonino Benacquista a encore frappé avec ce sens inné de l’humour noir dilué au vitriol qui fait sourire une dernière fois avant le rictus fatal, ses histoires ordinaires aux personnages qui flirtent avec l’extraordinaire, ses polars au suspense inattendu. Avec lui son complice en dessin Nicolas Barral (Dieu n’a pas réponse à tout, Les Cobayes), un duo qui a fait ses preuves et pourrait pour cause d’humour décalé et ravageur figurer dans leur fameux guide.

Le Guide Mondial des records Baron est un célibataire moyen, français et sans histoires. Ce sont celles des autres qu’il écoute, leur records les plus stupides, intelligents parfois, surprenants mais toujours uniques. Le plus rapide avaleur de hot-dogs ou de douzaines d’huitres, le cultivateur du plus gros chou-fleur, la plus vieille nageuse sur cent mètres, il les inscrit dans le grand guide mondial des records. Dans le lot il y a beaucoup de braves gens mais aussi des tordus du cervelet. Il reçoit une lettre d’un type qui a décidé de devenir le plus grand meurtrier en série de tous les temps et en prime l’accuse de l’avoir motivé. Un fada sans doute sauf qu’il y a bien du cadavre au dessert. Baron qui file le parfait amour avec une jolie majorette reine du lancer de battons en réfère à la police qui fait du surplace. Il ne reste plus à Baron qu’à se prendre pour Maigret.

Si l’histoire est atypique, les personnages de Tonino Benacquista le sont tout autant par leur banalité apparente. Ils nous ressemblent, ont les mêmes tics, passions, vies quotidiennes et sont d’un seul coup confrontés à l’exception. Baron a les méninges qui le démangent et s’en sortira en plus sur une volte-face géniale. On le suit à la trace avec sympathie et amitié. Nicolas Barral lui a donné une belle tête de vainqueur, ce qu’il est en fait. Un grand moment, toujours plus, qui nous fait sourire de nos propres travers passés au tamis par Benacquista.

Le Guide Mondial des records, Dargaud, 14,99 €

Le Guide Mondial des records

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