Cela va de soi, Cocteau décrypté

Il est l’un des personnages les plus fantasques, brillants du siècle dernier mais son aura restera éternelle. Jean Cocteau pour ceux de ma génération n’est pas une image figée mais au contraire un dandy vivant qui virevolte, crée, filme, séduit, dessine, écrit. Cela va de soi de Serge Annequin est une balade insensée, celle d’un jeune étudiant en cinéma qui va pister le mystère Coriolan, film mythique, peu vu de Cocteau produit par Henri Filipacchi à qui l’on doit (et oui) la création du Livre de Poche. Un ouvrage à la limite de la raison mais envoûtant, pertinent et séduisant sur un trait d’Annequin (Constellation(s)) qui enthousiasme.

Cela va de soi

Coriolan, Cocteau dessine. 1947 il reçoit Jean Genet, Jean Marais, Filipacchi pour leur annoncer qu’il va faire un film sans spectateur, Coriolan. Personne ne pourra le visionner. Un chef d’œuvre invisible. Jean Marais sera Coriolan, Cocteau le magicien, Josette Day l’héroïne. Genet sera le comte Popof. Mais quelle sera l’intrigue ? En 2013 à Los Angeles Elisa Lam rentre dans la plus grande librairie de la ville, visite le rayon Cocteau, lit le texte sur Coriolan, la chasse à l’aigle dans l’Art du cinéma. Retour à l’hôtel, médicaments, visions et Elisa rentre dans l’ascenseur filmée par les caméras de surveillance. De nos jours, Jules présente un exposé à ses camarades de fac. Coriolan, il n’en a pas trouvé le synopsis. Il va le comparer à un second film, celui de l’étudiante qui gesticule seule dans l’ascenseur. Elle sera retrouvée noyée sur le toit dans un réservoir d’eau potable. Jules va signer un documentaire, un mémoire. Un master de cinéma qui conjugue un film invisible et une vidéo YouTube.

Jules va tirer les fils, vit mal sa relation avec sa copine Léa. On est sur une digression sur le cinéma, une belle progression très intéressante où se mêle réalité au quotidien du héros et références à des films. Fantôme de Élisa, amour en suspension, théâtre et décors, amitié masculine. On plonge avec Jules sans ennui, instinctivement. Coriolan revit. Étrange et émouvant, dramatique aussi.

Cela va de soi, Paquet, 22 €

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