Interview : Cosey, la fin du cycle de Jonathan

Bernard Cosandey avait quitté ses montagnes pour l’inauguration de son exposition chez Barbier-Mathon à Paris. Son dernier album, Celle qui fut (Le Lombard) vient de sortir. Cela a été l’occasion de rencontrer un auteur discret, celui de Jonathan mais de bien d’autres univers. Cosey a le talent rare d’un créateur d’histoires et de personnages dans lesquelles l’humain l’emporte sur tout autre considération. (Propos recueillis par JL. TRUC)

Cosey
Cosey. JLT ®

Celle qui fut est la fin d’un cycle, n’est-ce pas ?

Oui. Cela s’est présenté comme cela, au fil de l’écriture du scénario. J’ai fait le constat que j’avais bouclé la boucle depuis le premier album dans lequel je montrais l’enfance tibétaine de Jonathan. Un retour aux sources ? Je ne sais pas. Mais j’ai la certitude que je ne referai pas un Jonathan.

Dans cet album il y a l’adolescence de Jonathan qui recroise plus tard ce mainate, Garuda, un témoin de sa jeunesse ?

Garuda c’est un gourou, le destin. Dans la tradition le plus grand gourou est la vie. Les évènements apprennent la vie à l’homme. Jonathan rencontre le mainate qui va le conduire à ces retrouvailles, à une relation qu’il va pour une fois concrétiser. J’ai eu pitié de lui (Rires). Je n’ai pas voulu le laisser dans un lien platonique comme avec la jeune Japonaise dans le précédent album.

Comment bâtissez-vous votre scénario ?

Jean-Claude Götting, Jacques de Loustal et Jean-Claude Denis
Götting, Loustal et Jean-Claude Denis à l’inauguration de l’exposition de Cosey à Paris. JLT ®

Je n’ai jamais d’idée principale. Ces sont des éléments disparates, éclectiques. Mon envie est de raconter une histoire. Je me plante toujours quand je pars d’une idée principale. Je prends des notes. Elles sont comme dans des tiroirs séparés que j’ouvre. J’en jette beaucoup et puis il y en a une ou deux qui me plaisent.

Vous semblez très calme en évoquant la création.

Erreur. J’angoisse. Je suis inquiet et pas aussi serein qu’il y paraît. Je travaille pièce par pièce. Je fais comme avec un puzzle. Je prends un morceau, n’importe lequel et je construis autour. Je fais ce que je peux avec ce que j’ai. J’essaye de composer une musique poétique. Et traiter de l’adolescence a été plutôt difficile. Je n’ai pas fait de couleur directe. Le dessin en noir et blanc est fait à part. Ce qui est plus simple si j’ai besoin de gratter. J’aime beaucoup la façon dont Brigitte Findakly travaille la couleur par exemple sur ordinateur, ses aplats. J’aime Blain, Sfar comme auteurs mais je lis peu de BD.

Jonathan parle aussi d’actualité, celle du Tibet.

Cosey
Bernard Cosey à l’inauguration de son exposition à Paris. Photo JLT ®

Le Tibet c’est comme le Rwanda. On n’en parle plus beaucoup. L’Occident a besoin économiquement de la Chine. La Chine qui a aussi ses problèmes de revendications, d’inégalité, qui transforme Pékin en chantiers sans tenir compte de son histoire. La dissidence va s’éveiller de plus en plus.

Vous avez fini un cycle mais vers quels horizons allez-vous vous tourner ?

Je recherche des scénarios. Je ne sais pas trop. Du contemporain, je suis paresseux pour travailler sur de l’historique. J’aime travailler avec ma propre documentation, j’aime mon époque. Il est un peu suspect et difficile de faire parler des personnages anciens. Je prends plaisir à raconter ce que je connais. La seule exception que j’ai faite est pour A la recherche de Peter Pan qui se passait dans les années trente. J’ai envie de peindre mais je n’aime dessiner que ce qui est une histoire. Enfin, écrire ? J’ai rédigé une nouvelle mais j’ai vite été frustré par le manque d’images.

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